Par Lucien Méadel
Le logement, qui affecte les conditions de vie de tous, et en particulier des jeunes et des enfants, devrait être une cause prioritaire à maints égard..Qu’en est il aujourd’hui? Les mesures annoncées par le gouvernement iraient dans le bon sens si elles étaient assorties d’une programmation des moyens à la hauteur des objectifs exprimés en termes d’offre de logements sociaux et intermédiaires.Il ne suffit pas de compter sur les bailleurs sociaux et les investisseurs privés pour développer et accélérer la construction des logements nécessaires pour répondre à la demande. Il ne suffit pas de laisser les bailleurs sociaux et les investisseurs privés miser sur les rabais décidés pour mobiliser quelques terrains appartenant à l’État, profiter des prêts à taux réduits de la caisse des dépôts ou même attendre des exonérations fiscales pour le logement très social.
Quant à l’impact du passage à 25 % du quota de logements sociaux imposé aux collectivités locales et de l’augmentation corrélative des pénalités pour celles qui ne respecteraient pas cette obligation, il serait à la fois difficile et aléatoire au demeurant d’en apprécier et d’en programmer les effets.
Quand on examine au cours de ces trente dernières années les décisions et les programmes des gouvernements qui se sont succédés, et les résultats obtenus, il n’est ni possible ni raisonnable d’incriminer essentiellement l’insuffisance des moyens pour expliquer le décalage croissant entre les besoins et l’offre de logements sociaux ou intermédiaires.
Aujourd’hui encore, le constat est unanime : il n’y a pas assez de logements et ils sont trop chers. Quant aux solutions et aux différents dispositifs de relance, leurs points communs sont leur complexité, avec une incertitude sur leur pertinence, leur faisabilité et leur date de réalisation.
Il est vrai que, dans l’état des lois et règlements en vigueur notamment dans le domaine de l’urbanisme, avec le rôle prépondérant imparti au secteur HLM et aux collectivités locales, et avec des investisseurs privés plutôt orientés vers l’optimisation fiscale, tout exercice de relance du logement social et intermédiaire est compliqué et difficile à gérer. Surtout dans un contexte budgétaire marqué depuis plusieurs années par une baisse tendancielle des aides nationales à la pierre, et par un décalage croissant des aides à la personne par rapport à l’évolution effective des loyers et des charges.
Raison de plus, à notre sens, pour tout remettre à plat et se décider à prendre la question par le bon bout, c’est à dire celui de la demande de logement en exploitant non seulement les listes d’attente, mais aussi toutes les données et statistiques disponibles sur le marché du logement:
- combien de logements sont recherchés? par catégories ( très sociaux, sociaux, intermédiaires), et par taille ( studios, F2,F3, F4, F5);
- où? centres villes, banlieue avec temps de transport pour aller au travail;
- quand? selon le degré d’urgence.
L’exploitation et le suivi de ces informations seraient confiés aux préfectures selon des modalités fixées par le Ministère du Logement et sous son contrôle.
Sur ces bases pourraient être lancés des appels d’offre auprès du secteur HLM et du secteur privé: leurs résultats seraient examinés par une commission où siégeraient des représentants des collectivités locales concernées.
Pour faciliter le pilotage et le contrôle de l’exécution des projets retenus, le déroulement des opérations serait suivi pour assurer le respect de la date d’achèvement prévue , ou en cas de retard appliquer des pénalités..
La généralisation, le suivi et le contrôle de ces “contrats programme pour le logement social et intermédiaire” devraient être organisés sous l’égide du Ministère du Logement et pourrait à terme être confiée à un “Office du logement social et intermédiaire”, avec le statut d’un établissement public interministériel.
Pour concourir à la crédibilité de ces nouveaux contrats, le financement de la contribution de l’Etat, à la fois pour les aides à la pierre et à la personne, ferait partie de “Programmes finalisés” prioritaires dans le Budget de l’Etat.
D’autres remises en question ou innovations mériteraient aussi d’être étudiées et si possible concrétisées avant la fin de l’année 2013
- le traitement financier et comptable des actifs des organismes d’HLM, véritables “biens de main morte”, amortis en 40 ans en moyenne, et non ré évaluables;
- la fixation des loyers sociaux attachée à chaque immeuble selon la date de son achèvement, d’où des différences de loyers mal comprises par les locataires d’un même organisme;
- la coordination des attributions de logement aux familles avec jeunes enfants, en fonction des places en crèches ou en maternelle disponibles ou de l’existence de transports publics pour les jeunes enfants non accompagnés( si possible lors du bouclage du financement des logements sociaux ou au moment des attributions, avec des “programmes PLAI jeunes”);
- la remise à niveau des loyers pour les locataires dont les revenus réguliers dépassent les plafonds HLM: remplacer le régime des suppléments de loyers, par un alignement au prix du marché ou une résiliation du bail.
- l’intégration des logements sociaux dans les programmes de développement des transports publics
- pour les logements intermédiaires, le lancement de projets d’intérêt public à monter avec des promoteurs et des investisseurs institutionnels dont il faudrait en même temps favoriser la réapparition sur le marché, par l’ouverture de “créneaux fonciers” voués aux logements intermédiaires dans les grandes agglomérations.
Enfin, en concertation avec les architectes et les entreprises de bâtiment, des nouveaux cahiers
des charges devraient être mis au point pour:
- répondre dans les délais les plus brefs aux besoins d’hébergement d’urgence, sur des terrains
- provisoirement disponibles dans les agglomérations importantes, ou en périphérie mais avec des moyens de transport public vers les centres d’activité;
- réduire de façon significative le coût des nouvelles constructions, notamment par le recours à la préfabrication pour des marchés groupés;
- permettre la transformation, si besoin, des logements nouvellement construis en unités adaptées à la demande;
- faciliter, voire même garantir, la maîtrise des charges locatives.
Le tableau à peine esquissé de la complexité du régime du logement social, de la multiplicité des intervenants, des enjeux budgétaires et sociaux de sa maîtrise, et de l’urgence de son développement devrait, si il pouvait être partagé et enrichi à la fois par ses opérateurs et par ses clients, permettre d’avancer. Dés lors, pourquoi ne pas militer pour que soient convoqués des “Etats Généraux du Logement” ? Ils permettraient de soumettre ces propositions concrètes aux acteurs et aux citoyens intéressés à ce sujet, avant de les mettre en oeuvre, vite…..