Malgré de nombreuses réformes ces dernières années, le système de retraite français demeure déficitaire et son besoin de financement, bien qu’en diminution depuis 2010, s’élève à près de 0,4 % du PIB en 2013, soit à peu près 10 Mds€. Selon les chiffres du Conseil d’Orientation des Retraites (COR) publiés en juin 2015, en projection, le solde financier du système de retraite demeurerait négatif au moins jusqu’au milieu des années 2020 (dans un scénario positif), les chiffres dépendant en tout état de cause de nombreuses hypothèses sur l’activité économique et les évolutions macroéconomiques, démographiques et les comportements des agents économiques au cours de leur carrière.
Face à ce constat, et à la nécessité d’assurer un équilibre de long terme durable, la tentation peut être grande d’agir sur les trois principaux facteurs régissant notre système de retraite, à savoir (i) le rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités (en reculant notamment l’âge de départ à la retraite), (ii) le taux de prélèvement global (en l’augmentant) et (iii) la pension moyenne de l’ensemble de retraités, relative au revenu d’activité moyen (en la diminuant).
Pour autant, et les projections le montrent bien, cela ne saurait constituer une solution dans la période actuelle, pour au moins deux raisons. La première, c’est que les réformes récentes n’ont pas fini de produire leurs effets et qu’il importe de s’assurer de leurs conséquences avant de durcir une nouvelle fois le système. La seconde, plus fondamentale, c’est que la pérennité de notre système de retraite dépend fortement de l’activité économique, notamment de la croissance des revenus d’activité (ou de la productivité du travail).
Alors que les perspectives de croissance économique en France sont positives mais demeurent faibles (l’INSEE, dans sa note de conjoncture de juin 2015, et le FMI, en juillet, ont fait état d’une croissance annuelle du PIB de 1,2 %) et que le FMI fait également part de perspectives de croissance mondiale durablement ralentie, notre priorité doit être le soutien à l’activité économique et à la reprise de l’emploi. C’est un des constats essentiels de cette crise : les dynamiques d’emploi ont fortement souffert et l’amélioration économique peine à se traduire sur le front du chômage. Or, et les projections du COR le soulignent, il est essentiel pour l’amélioration durable du solde financier du système de retraite que l’activité économique et les revenus d’activité soient soutenus.
Un resserrement des trois facteurs évoqués précédemment semble de nature à venir entraver, pour partie, les perspectives de croissance actuelles, favorables mais fragiles. Par ailleurs, leurs effets positifs doivent être nuancés (par exemple, l’insertion des seniors sur le marché de l’emploi est relativement difficile en France).
A ce titre, des mesures de soutien à l’activité, permettant d’améliorer significativement les revenus d’activité, semblent préférables. Parallèlement, une réflexion sur l’impact de notre système de retraite sur la croissance de long terme de notre pays doit être menée. Elle peut passer, par exemple, par une simplification des différents systèmes de retraites et leur adaptation aux nouveaux enjeux du monde du travail ¹.
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¹ Par exemple, il serait possible de prendre en compte, pour le calcul des pensions, la totalité des contributions tout au long de la carrière, y compris dans le cadre d’un cumul emploi-retraite. Cela créerait une incitation à la réduction progressive du taux d’activité et non à un arrêt brutal comme c’est le cas aujourd’hui, avec des impacts forts en termes de transfert des compétences et de taux d’emploi des seniors.