Tout ce joue dès le début ou presque : un bon départ dans une course comme dans la scolarité d’un enfant est primordial pour installer les conditions de réussite tout au long du parcours. La scolarisation des « tout petits » est une réponse à triple entrée : pour les enfants, pour les parents et pour organiser des moyens de garde sur un territoire donné de plus en plus confronté aux déficits de places en crèche ou d’assistantes maternelles.
Les 2 ans dans l’école
La scolarisation des enfants de 2 ans se fait par inclusion : même si des stratégies d’accueil échelonné en début d’année, de scolarisation à mi-temps, d’activités scolaires différenciées, sont mises en œuvre par les enseignants, au final les enfants de 2 ans sont des élèves comme les autres. Leurs besoins spécifiques sont peu pris en compte tant sur le plan du rythme de vie, du matériel que sur le plan affectif.
Or les professionnels reconnaissent des besoins spécifiques et considèrent cet âge comme un âge charnière où se mettent en place les médiations entre l’enfant et le monde extérieur, loin des préoccupations scolaires que l’école leur propose et que les autres élèves, âgés de 3, 4,5 ans, peuvent développer.
Quelle école ?
Si l’école maternelle se doit d’accueillir tous les enfants de 2 ans en prenant en compte leurs besoins ? Ne doit-elle pas alors redéfinir ses missions ; Ce réajustement ne va t-il pas l’éloigner, voir l’affranchir, de missions essentielles ?
Si le rôle socialisant de l’école est cohérent pour l’ensemble des enfants de 2 à 6 ans qu’en est-il pour l’acquisition de compétences telles que : la compréhension des enjeux de l’école, les premières conscientisations des apprentissages, le désir d’apprendre… ? Ce sont des compétences qui contribuent à la réussite de l’enfant en lui permettant de construire son identité d’élève, en lui donnant du sens à l’école et des apprentissages : autant d’objectifs qui appellent une fréquentation régulière de l’école. Autant d’objectifs qui sont bien loin des priorités et des potentialités des touts petits.
Alors ne doit –on pas imaginer un mode d’accueil innovant pour tous les enfants de 2 ans ? : Un lieu qui ne serait pas dénommé « classe », un lieu pensé et adapté aux spécificités d’un enfant de 2 ans.
Si on définit comme « objectif phare : réduire, d’ici 2030, par quatre les sorties sans qualifications et sans diplôme, pour les situer en dessous de 5 % de la génération » les actions devront être centrées sur la prévention et la remédiation de l’échec scolaire, elles ne peuvent exclure des actions centrées sur la petite enfance : notamment la prise en charge des enfants de 2 ans dans des structures dont une des missions prioritaire serait tournée vers le développement et l’acquisition du langage, variable inéluctable et essentielle de la réussite scolaire.
Dans les futurs réseaux d’éducation prioritaire, ces structures auraient un rôle à jouer auprès des parents : faciliter leur connaissance du système éducatif, engager la collaboration et la confiance entre l’école et la famille, permettant ainsi de réduire la distance entre ces deux mondes. L’appui d’un multi-partenariat (petite enfance, éducation nationale, affaires sociales) en lien avec les PEDT (projet éducatif de territoire) soutiendrait ces démarches.
De telles missions favoriseraient une entrée réussie dans l’école pour des enfants dont la culture scolaire n’est une évidence ni pour eux, ni pour leurs parents et les engageraient sur le chemin de la réussite.
Christine Bauducco
Christine BAUDUCCO, animée par la perspective d’agir pour l’amélioration du système éducatif, a allié son expérience professionnelle à une réflexion théorique et à une recherche sur les conditions de réussite pour les élèves et le développement de pratiques innovantes. Les ouvrages qu’elle a publiés « Le classeur des savoirs » et « Sciences et arts au fil de l’air» explicitent ses travaux.
Les conférences qu’elle effectue dans le cadre de la formation des Professeurs des écoles maternelles lui permettent d’observer et d’échanger avec de nombreux enseignants, conseillers pédagogiques de circonscription et inspecteurs de l’éducation nationale. Les idées avancées, notamment pour l’école maternelle, s’appuient ainsi sur les réalités de terrain.